Forces de Police Nationale : Un énième rappel à l’ordre ou le souffle nouveau de la Cinquième République ?

Le 19 mai 2025, à l’École Nationale de Police d’Owendo, le Ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation, Hermann IMMONGAULT, a prononcé une allocution musclée, exhortant les Forces de Police Nationale à rompre avec les « pratiques contraires à l’éthique républicaine ». Un message fort, certes, mais qui soulève une question fondamentale, celle d’un véritable tournant ou d’un énième rappel à l’ordre dans un pays où la confiance envers la police est au plus bas ?
Dans un communiqué du Ministère de l’Intérieur, Hermann IMMONGAULT a insisté sur la nécessité d’une « refondation des pratiques » au sein des Forces de l’Ordre.
Le discours, prononcé en présence du Commandant en Chef de la Police Nationale, a mis laccent sur la proscription des dérives qui minent la réputation de l’institution.
« La Cinquième République n’est pas un simple slogan. Elle exige un changement profond de notre manière de servir l’État. »
Les mots du Ministre résonnent familièrement aux oreilles des Gabonais. Depuis des années, les rapports d’organisations nationales et internationales, ainsi que les témoignages quotidiens, peignent le tableau d’une police souvent perçue comme corrompue et abusive.

Des enquêtes d’Afrobarometre, citées par plusieurs observateurs, ont révélé en 2021 et 2022 une confiance abyssale des Gabonais envers la police et la gendarmerie. Près de 75% des citoyens n’ont « pas du tout confiance » ou « juste un peu confiance » aux forces de l’ordre.
Plus accablant encore, 98% des personnes interrogées estimaient que « la majorité » des policiers et gendarmes étaient impliqués dans des affaires de corruption.
Les « contrôles abusifs » et le « racket » sont malheureusement des réalités que nombre de Gabonais vivent quotidiennement.
Ces pratiques, outre qu’elles entachent l’image des forces de l’ordre, minent l’État de droit et nourrissent un sentiment d’injustice et d’impunité.

La mention des « dérives sur les réseaux sociaux » par le Ministre suggère également de nouvelles formes de comportements non professionnels.
Ces investissements et ces rappels à l’ordre suffiront-ils à transformer en profondeur une culture institutionnelle qui semble profondément ancrée ? Pour les Gabonais, lassés des promesses non tenues et des dérapages persistants, le scepticisme est de mise.
Le véritable changement ne résidera pas seulement dans les décrets et les discours, mais dans la traduction concrète de ces intentions sur le terrain, dans la reddition de comptes des agents fautifs et dans une amélioration tangible de la relation entre la police et les citoyens.

L’appel du Ministre IMMONGAULT est un pas nécessaire, mais il n’est que le point de départ d’un long chemin. La Cinquième République devra prouver, par des actes concrets et une transparence accrue, qu’elle est capable de faire de la Police Nationale une force de l’ordre véritablement « irréprochable, visible, professionnelle et exemplaire », au service du peuple gabonais.